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La relation thérapeutique revisitée


«QUI INFLUENCE QUI ?»
Par le Dr Irène BOUAZIZ, Psychiatre à Paris



La relation thérapeutique revisitée
Cet article est le résultat de multiples influences. Tout d’abord l’influence de mes patients qui m’ont appris, au fil des années, qu’ils en savent plus que nous sur ce qui est bon pour eux et qu’il peut être fructueux de se laisser influencer par eux.

L’influence, bien sûr, de mes maîtres, de mes collègues et aussi, plus spécifiquement, des organisateurs du VIe Forum qui ont su se montrer incitatifs dans leur présentation du thème de ces journées. J’ai aussi été fortement influencée par tous ceux qui étaient là devant moi dont je connais ou dont j’imagine les positions. Je dois enfin citer l’influence de ma collègue, le Docteur Chantal Gaudin, qui au fil des mille et une relectures de ce texte, m’a incitée, avec plus ou moins de succès, à le rendre plus compréhensible.

La communication est un phénomène circulaire. L’évocation de toutes ces influences introduit l’influence qu’à mon tour je vais tenter d’exercer sur vous. Je vais essayer de vous persuader du bien-fondé de mon point de vue sur la question de l’influence réciproque.

J’imagine que vous êtes tous bien d’accord avec les théoriciens de Palo Alto lorsqu’ils disent : « On ne peut pas ne pas communiquer, donc on ne peut pas ne pas influencer. »

Oui, nous influençons nos patients pour les aider à aller mieux, mais eux aussi nous influencent. Je me propose donc de montrer comment la prise en compte de la réciprocité de l’influence dans l’interaction thérapeute/ patient amène à concevoir autrement la relation thérapeutique. Après un petit tour de manège dans le monde de la circularité, je développerai les implications de cette conception dans la pratique de la thérapie brève de Palo Alto. Je montrerai ensuite pourquoi il est précieux de savoir se laisser influencer par les patients et comment le faire. Une vignette clinique illustrera mes arguments.

MAIS QUI DONC INFLUENCE QUI ?

Il est impossible de rendre compte d’un phénomène circulaire au moyen du langage verbal qui, par sa structure linéaire, impose de séquencer ce que l’on veut transmettre. Ainsi, pour parler de l’influence réciproque dans la relation thérapeutique, il me faudra évoquer alternativement l’influence de l’un sur l’autre ; donc ponctuer l’échange en le faisant débuter quelque part. La ponctuation des séquences interactionnelles est un autre des axiomes de la communication énoncé par l’Ecole de Palo Alto.

Cette inévitable ponctuation favorise la tendance à raisonner en termes de relation de cause à effet et les désaccords sur la façon de ponctuer sont à l’origine de bien des conflits. Ceux d’entre nous qui ont une formation médicale ont appris à ne pas se laisser influencer par les patients afin de pouvoir poser un diagnostic « objectif ». Et en nous formant à l’hypnose et/ ou à une thérapie brève, nous avons appris à nous défendre de l’influence que le patient ne manque pas d’exercer sur nous. Nous avons appris à garder une certaine distance pour rester en méta position. Nous avons appris à résister au flux de l’empathie pour ne pas être submergé par le désespoir. Et, surtout, nous avons appris à contrer ou à contourner les « résistances au changement » avec des stratégies aux connotations guerrières plus ou moins marquées selon les écoles. Que nous pensions que ces « résistances » résultent d’un processus inconscient ou d’un phénomène homéostatique, nous avons appris à les combattre.

Si l’on tente d’adopter un point de vue systémique et de se départir, autant que faire se peut, de la vision linéaire, notre conception de ce qui se passe dans la relation thérapeutique devient très différente. Dans cette construction de la réalité-là, il n’y a pas un patient qui vient demander à changer tout en résistant au changement, il n’y a pas un thérapeute expert qui élabore des techniques sophistiquées pour produire un changement. Il y a une relation circulaire qui génère des qualités nouvelles.

Et ces qualités, dites émergentes, par exemple le changement ou l’absence de changement chez le patient, ou encore l’efficacité ou l’inefficacité des suggestions du thérapeute, ne préexistent pas intrinsèquement chez l’un ou l’autre des protagonistes. Dans cette construction de la réalité-là, on ne considère pas que le patient est, en lui-même, disposé ou résistant au changement, on ne considère pas que le thérapeute est, en lui-même, habile ou malhabile. Pas plus qu’on ne considère qu’il y a de l’eau dans l’hydrogène ou dans l’oxygène avant que leurs molécules ne se combinent.

L’INFLUENCE, POUR QUOI FAIRE ?

Je vais maintenant décrire rapidement comment, à partir de telles prémisses systémiques et en optant pour un modèle de thérapie brève qui repose sur une stratégie paradoxale, je comprends ce qui se joue dans les influences réciproques entre patient et thérapeute.

Ponctuons arbitrairement l’interaction en commençant par décrire l’influence du thérapeute sur le patient. Dans la relation thérapeutique, je cherche à influencer le patient pour atteindre un objectif bien précis : qu’il arrête de faire ce qu’il fait habituellement, sans résultat, pour résoudre son problème. J’influence le patient pour qu’il cesse ses tentatives de solution inefficaces parce que faire « plus de la même chose » contribue à maintenir le problème. Si j’ai recours au paradoxe, c’est parce que je pense que le relâchement de la tension inopérante vers l’objectif, le relâchement de la tension vers les buts conscients, dirait Gregory Bateson, contribue à créer un contexte dans lequel le patient se trouve plus disponible à lui-même et à son environnement, et par là, plus à même d’accéder à d’autres ressources. Le relâchement de cette tension, le lâcher- prise diraient les hypnothérapeutes, ou le « savoir attendre pour que la vie change » dirait François Roustang, produit un contexte favorable à un changement écologique.

Or, comme chacun sait, le paradoxe va à l’encontre de ce que le bon sens dicte de faire. On imagine donc bien qu’il est nécessaire d’user de multiples techniques d’influence pour convaincre le patient de renoncer à des tentatives de solution qui lui apparaissent logiques.

Par ailleurs, il est bien connu que la qualité de la relation entre le thérapeute et le patient joue un rôle majeur dans la réussite d’une thérapie. Si l’on regarde l’interaction d’un point de vue systémique, ce que l’on appelle qualité de la relation résulte des messages échangés entre les protagonistes. Ces messages sont transmis par le langage verbal, plus particulièrement dans sa dimension implicite, par le langage non verbal et sans doute par d’autres modes de communication encore mal identifiés. Ainsi, parallèlement aux messages que j’adresse au patient pour l’amener à arrêter ses tentatives de solutions, je l’influence aussi par des messages implicites et non verbaux qui expriment ce que je pense de lui. Ces messages, justement parce qu’ils ne sont pas explicites, lui renvoient l’image que j’ai réellement de lui bien plus efficacement que toutes les déclarations que je peux faire. En étant particulièrement attentive à cette dimension implicite de la communication, j’ai donc la possibilité de créer, dans le temps de l’entretien, une nouvelle réalité dans laquelle le patient peut se sentir plus compétent, plus respectable, plus responsable.

Passons maintenant à l’autre versant de l’interaction : l’influence du patient sur le thérapeute. Le patient use de son influence pour tenter de nous faire comprendre son problème, pour nous amener à le voir comme il le voit et pour nous convaincre du bien-fondé de sa plainte. Il cherche aussi, de façon implicite, à nous amener à agir dans le sens de son objectif, à faire, comme lui, plus de la même chose, c’est-à-dire à aller dans le sens de ses tentatives de solution.

En effet, tout message, et c’est là un autre axiome de la communication que l’on doit à Gregory Bateson, comporte deux dimensions : une dimension explicite, dite indice, et une dimension implicite, dite ordre. Cet ordre implicite contenu dans tout message commande à son destinataire de faire quelque chose. Et, élément particulièrement important, la signification donnée à cet ordre varie selon le contexte dans lequel est énoncé le message. Donc, dans le contexte d’une thérapie, en même temps que le patient nous décrit sa souffrance, il nous commande de la soulager. Le message « je suis angoissé » adressé à un thérapeute donne un ordre implicite : « Délivrez-moi de cette angoisse. »

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Rédigé le 01/08/2018 à 21:42 | Lu 446 fois | 0 commentaire(s) modifié le 01/08/2018





Sophie Tournouër, Psychologue clinicienne, Hypnothérapeute et Thérapeute Familiale. praticienne... En savoir plus sur cet auteur

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