Notre ami, le Dr Thierry Servillat était l’invité de la Radio RCF Accords Charente-Maritime, le 13 mai 2014.
L’occasion de revenir sur le 5ème congrès international "Hypnose et douleur" qui se tenait à La Rochelle les 1, 2 et 3 mai.
- Vous êtes psychiatre, psychothérapeute, hypnothérapeute. Est-ce que vous avez été agriculteur un jour ?
Non, pas encore…
- Erickson, qui était un peu votre maître à penser, a fait des études de médecine parce qu’il ne pouvait pas être agriculteur.
Oui il a été vraiment très atteint dès son enfance par des problèmes de santé, et paradoxalement effectivement, ça l’a amené à avoir un destin qui n’était pas prévu, qui était de devenir médecin et psychologue à la fois. (…)
C’est dû à la personnalité tout à fait exceptionnelle de cet homme qui a transformé ses difficultés en ressources et en stimulations pour faire quelque chose qui n’était pas prévu au programme de cette famille qui était dans la misère et il a pu devenir un grand médecin, un génie de la médecine et de la psychologie.
- Il a exercé non seulement dans la recherche mais il a eu un cabinet avec des patients.
Tout à fait. Il a fait sa première partie de carrière en tant que chef de service en psychiatrie dans un hôpital américain ; ensuite il a du de nouveau s’interrompre à cause de problèmes de santé. Il ne pouvait plus que travailler en libéral, chez lui en l’occurrence.
- Qu’est-ce que l’hypnose ?
L’hypnose, c’est Milton Erickson qui nous l’a vraiment appris. C’est un phénomène naturel que tout être humain a en lui et qui survient toutes les deux heures, de façon naturelle sauf si on lutte contre. C’est un phénomène qui fait l’objet de beaucoup d’études et qui certainement aide à intégrer ce que l’on vient d’apprendre, et aussi à se réparer. Il y a des hormones particulières qui sont synthétisées pendant cette période notamment pour lutter contre le stress, l’inflammation. C’est une capacité naturelle d’auto guérison puissante même si elle a ses limites.
- Auto guérison, donc on peut s’auto hypnotiser ?
On peut s’auto hypnotiser, c’est d’ailleurs une des grandes thématiques de notre époque actuelle. Il y a beaucoup d’intérêt notamment pour les personnes qui ont des douleurs chroniques, à apprendre à s’hypnotiser, parfois même pour pouvoir gérer des douleurs dues à une maladie pour lesquelles les médicaments n’arriveraient pas à soulager. C’est une grande dimension de l’hypnose contemporaine.
- C’est aussi à la base d’un langage non verbal où on peut voir la différence entre le langage exprimé verbalement et le langage des gestes et de l’être.
L’hypnose apporte une vision nouvelle qui coïncide avec une vision très ancienne à savoir que l’intelligence est dans le corps également. On a vécu dans une civilisation occidentale pendant deux siècles où tout était dans la tête. Et l’hypnose donne une attention au corps, à l’intelligence du corps, et effectivement c’est une sorte d’inversion par rapport au paradigme classique.
- C’est particulier à la civilisation occidentale. Est-ce que cela veut dire que l’hypnose existait déjà dans les pays asiatiques par exemple ?
En tant que phénomène naturel tous les êtres humains de toutes les époques et de toutes les cultures ont des phénomènes hypnotiques spontanés. Hypnose c’est un mot occidental et on trouve des équivalents dans la culture indienne avec des états de transe (yoga), dans le bouddhisme, et dans toutes les cultures traditionnelles il y a des états de transe traditionnels qui sont utilisés pour la guérison.
- C’est peut-être ce que l’on trouve également dans les régions chrétiennes avec les miracles par exemple ou certains grands saints qui sont en état d’hypnose peut-être…
Toutes les cultures ne peuvent que reconnaître qu’il se passe parfois des guérisons inexpliquées et scientifiquement pour l’instant non compréhensibles. Je dis souvent dans ma pratique que ce n’est pas parce que la médecine ou la science ne comprend pas que les phénomènes n’existent pas. Et dans la pratique de la médecine on est régulièrement surpris par des guérisons inexpliquées, et après en tant que scientifique je ne donne pas d’explication particulière puisque la science travaille très activement pour essayer de mieux comprendre les phénomènes hypnotiques.
- Ce qu’Erickson a amené est très différent de ce que Freud a apporté.
C’est très différent parce que Milton Erickson avait une vision optimiste de l’hypnose. Et aussi de ce que l’on appelle l’inconscient en psychologie. Quand vous vous couchez le soir vous allez vous endormir et pendant la nuit votre cœur bat quand même, et votre corps fonctionne. Et même le cerveau est actif dans la vie onirique et notamment dans les rêves. Il y a donc des phénomènes inconscients. Freud a beaucoup participé à l’étude sur l’inconscient mais il en avait une vision qui est maintenant datée. L’inconscient pour Freud était à la fois créatif mais en même temps une source de problèmes. Il fallait s’en méfier et faire une psychanalyse pour désamorcer les ruses maléfiques de l’inconscient.
L’occasion de revenir sur le 5ème congrès international "Hypnose et douleur" qui se tenait à La Rochelle les 1, 2 et 3 mai.
- Vous êtes psychiatre, psychothérapeute, hypnothérapeute. Est-ce que vous avez été agriculteur un jour ?
Non, pas encore…
- Erickson, qui était un peu votre maître à penser, a fait des études de médecine parce qu’il ne pouvait pas être agriculteur.
Oui il a été vraiment très atteint dès son enfance par des problèmes de santé, et paradoxalement effectivement, ça l’a amené à avoir un destin qui n’était pas prévu, qui était de devenir médecin et psychologue à la fois. (…)
C’est dû à la personnalité tout à fait exceptionnelle de cet homme qui a transformé ses difficultés en ressources et en stimulations pour faire quelque chose qui n’était pas prévu au programme de cette famille qui était dans la misère et il a pu devenir un grand médecin, un génie de la médecine et de la psychologie.
- Il a exercé non seulement dans la recherche mais il a eu un cabinet avec des patients.
Tout à fait. Il a fait sa première partie de carrière en tant que chef de service en psychiatrie dans un hôpital américain ; ensuite il a du de nouveau s’interrompre à cause de problèmes de santé. Il ne pouvait plus que travailler en libéral, chez lui en l’occurrence.
- Qu’est-ce que l’hypnose ?
L’hypnose, c’est Milton Erickson qui nous l’a vraiment appris. C’est un phénomène naturel que tout être humain a en lui et qui survient toutes les deux heures, de façon naturelle sauf si on lutte contre. C’est un phénomène qui fait l’objet de beaucoup d’études et qui certainement aide à intégrer ce que l’on vient d’apprendre, et aussi à se réparer. Il y a des hormones particulières qui sont synthétisées pendant cette période notamment pour lutter contre le stress, l’inflammation. C’est une capacité naturelle d’auto guérison puissante même si elle a ses limites.
- Auto guérison, donc on peut s’auto hypnotiser ?
On peut s’auto hypnotiser, c’est d’ailleurs une des grandes thématiques de notre époque actuelle. Il y a beaucoup d’intérêt notamment pour les personnes qui ont des douleurs chroniques, à apprendre à s’hypnotiser, parfois même pour pouvoir gérer des douleurs dues à une maladie pour lesquelles les médicaments n’arriveraient pas à soulager. C’est une grande dimension de l’hypnose contemporaine.
- C’est aussi à la base d’un langage non verbal où on peut voir la différence entre le langage exprimé verbalement et le langage des gestes et de l’être.
L’hypnose apporte une vision nouvelle qui coïncide avec une vision très ancienne à savoir que l’intelligence est dans le corps également. On a vécu dans une civilisation occidentale pendant deux siècles où tout était dans la tête. Et l’hypnose donne une attention au corps, à l’intelligence du corps, et effectivement c’est une sorte d’inversion par rapport au paradigme classique.
- C’est particulier à la civilisation occidentale. Est-ce que cela veut dire que l’hypnose existait déjà dans les pays asiatiques par exemple ?
En tant que phénomène naturel tous les êtres humains de toutes les époques et de toutes les cultures ont des phénomènes hypnotiques spontanés. Hypnose c’est un mot occidental et on trouve des équivalents dans la culture indienne avec des états de transe (yoga), dans le bouddhisme, et dans toutes les cultures traditionnelles il y a des états de transe traditionnels qui sont utilisés pour la guérison.
- C’est peut-être ce que l’on trouve également dans les régions chrétiennes avec les miracles par exemple ou certains grands saints qui sont en état d’hypnose peut-être…
Toutes les cultures ne peuvent que reconnaître qu’il se passe parfois des guérisons inexpliquées et scientifiquement pour l’instant non compréhensibles. Je dis souvent dans ma pratique que ce n’est pas parce que la médecine ou la science ne comprend pas que les phénomènes n’existent pas. Et dans la pratique de la médecine on est régulièrement surpris par des guérisons inexpliquées, et après en tant que scientifique je ne donne pas d’explication particulière puisque la science travaille très activement pour essayer de mieux comprendre les phénomènes hypnotiques.
- Ce qu’Erickson a amené est très différent de ce que Freud a apporté.
C’est très différent parce que Milton Erickson avait une vision optimiste de l’hypnose. Et aussi de ce que l’on appelle l’inconscient en psychologie. Quand vous vous couchez le soir vous allez vous endormir et pendant la nuit votre cœur bat quand même, et votre corps fonctionne. Et même le cerveau est actif dans la vie onirique et notamment dans les rêves. Il y a donc des phénomènes inconscients. Freud a beaucoup participé à l’étude sur l’inconscient mais il en avait une vision qui est maintenant datée. L’inconscient pour Freud était à la fois créatif mais en même temps une source de problèmes. Il fallait s’en méfier et faire une psychanalyse pour désamorcer les ruses maléfiques de l’inconscient.
- Ruses maléfiques de l’inconscient ?
Tout à fait, la psychanalyse fait partie des philosophies du soupçon, avec le marxisme, et aussi Nietzsche., il y a tout un contexte, de la fin du 19e siècle, avec la notion de soupçon. Erickson va rompre avec cette vision, il va rompre avec beaucoup de choses, en proposant, dans la continuité des magnétiseurs du 19ème siècle, de concevoir en termes de capacités de ressources intérieures que toute personne a, pour améliorer sa vie et sa santé. Et donc l’inconscient est uniquement bienveillant, et en terme de ressources, uniquement.
- Il n’a jamais voulu écrire d’ouvrages théoriques sur ses méthodes ?
Erickson s’est effectivement beaucoup méfié, et il s’en amusait, de la tendance en psychologie, je le cite « de pondre une nouvelle théorie du psychisme humain, chaque année, qui expliquerait tout, et qui serait en rupture avec les précédentes ».
Donc il était quelque part, modeste, mais surtout sérieux ; nous sommes dans l’air de la complexité, l’être humain, notre monde, notre écosystème, tout cela est complexe, et la science n’a pas tout expliqué nous le savons bien ; et Erickson pressentait déjà que nous étions à la fin des grandes idéologies, et qu’il valait mieux être pragmatique, essayer de faire de son mieux, être modeste, et puis plus tard la science nous aidera à comprendre.
- Sa théorie également parle de l’individu et que deux personnes différentes n’auront pas la même thérapie.
C’est aussi un grand apport d’Erickson. Il disait « il faut faire du sur-mesure et pas du prêt à porter».
- Pourquoi ?
Car si même en apparence, les problèmes de deux personnes peuvent être similaires voire identiques, ils n’ont pas les mêmes ressources, les mêmes capacités. Certaines personnes vont faire de la photographie ou savoir dessiner, er d’autres vont plutôt être musiciens, et encore d’autres, des compétences d’agriculteurs. Et donc les solutions ne sont pas les mêmes selon les ressources des gens, et ça c’est une rupture avec deux siècles très rationalistes que nous avons en science. Nous avions des protocoles en fonction du problème, nous devions avoir les solutions. Et le rapport entre les problèmes et les solutions n’est pas si proche que ça. Les solutions dépendent beaucoup de ce que nous savons faire dans notre vie.
Donc il y a aussi une sorte de révolution scientifique apportée par Erickson au niveau de la psychologie et maintenant c’est une nouvelle vision qui s’intègre avec ce que pensent beaucoup de personnes en dehors de la médecine et de la psychologie, des économistes, des managers, c’est d’observer ce qui marche au lieu d’essayer de supprimer ce qui ne marche pas.
- J’ai essayé de vous déstabiliser au début de l’entretien en vous posant la première question, en utilisant donc les méthodes que préconisait Erickson pour désorganiser le schéma mental. Et ça, ça aiderait à se reposer les questions et ne pas rester bloqué dans un schéma ?
Peut-être vous faites allusion effectivement à des techniques comme la surprise, la déstabilisation ? C’est une question délicate. Il ne faut pas trop pratiquer la confusion ou ces techniques de surprise voire de provocation ; il faut le faire uniquement quand c’est indispensable. Il y a effectivement des personnes qui sont figées dans leurs problèmes, et là il y a des fois une pertinence à déstabiliser la personne pour pouvoir l’aider. C’est ce que faisait Socrate il y a deux mille ans. Il déstabilisait des personnes pour qu’elles puissent s’ouvrir à la nouveauté, au changement.
Quelque part, Erickson reprend Socrate tout en accordant bien sûr une vertu importante au fait d’accompagner ensuite la personne dans la construction d’un nouvel équilibre et d’un nouveau fonctionnement. Ça c’est très important sur un plan éthique, on peut être amené à déstabiliser des personnes mais ensuite on va être très présent, très attentif pour que la personne se réorganise en lu donnant le temps de le faire correctement en fonction de ses valeurs notamment.
- Mais prendre un tel pouvoir sur des personnes, est-ce qu’il n’y a pas un risque, pour des personnes mal intentionnées, de dérapage ?
Il y a bien évidemment un risque. C’est pour cela que comme l’hypnose est actuellement en vogue, il y a une efflorescence d’instituts bidons, charlatanesques qui forment n’importe qui. Et au sein de la CFHTB, Confédération Francophone d'Hypnose et Thérapies Brèves dont je fais partie et que je co-anime avec des collègues, nous veillons à respecter des critères éthiques, de former des professionnels et aussi qu’ils respectent un certain nombre de principes et notamment que c’est le patient qui fixe lui-même l’objectif du travail thérapeutique. Nous sommes des serviteurs au service du patient.
Nous « mettons notre puissant », nous la rendons au patient ; l’approche éricksonienne c’est de donner du pouvoir au patient. C’est en cela qu’elles peuvent être subversives. Nous essayons de donner du pouvoir et de l’autonomie aux usagers et aux patients qui apprennent l’hypnose.
- Erickson craignait d’ailleurs dès le départ d’être considéré comme un gourou ou un magicien.
Erickson a toujours été très vigilent à ne pas créer de dogme, à ne pas forcément créer d’écoles, et à surtout rester très humain. Erickson disait « les faiblesses sont les fibres de la vie ». Il était lui-même avec beaucoup de déficits de santé et sensoriels et il était très attaché probablement vu ses origines très modestes et agricoles au fait que la vie est quelque chose de très fragile et qu’il faut protéger. Et il était très loin des questions de puissance et de pouvoir qu’on peut voir dans les films et dans les manifestations d’hypnose de spectacle que nous dénonçons à la Confédération.
Rappelons enfin que vous êtes rédacteur en chef de la Revue Hypnose & Thérapies Brèves
Interview retranscrite par Marion Chervy et avec la participation de Laurent Gross.
Tout à fait, la psychanalyse fait partie des philosophies du soupçon, avec le marxisme, et aussi Nietzsche., il y a tout un contexte, de la fin du 19e siècle, avec la notion de soupçon. Erickson va rompre avec cette vision, il va rompre avec beaucoup de choses, en proposant, dans la continuité des magnétiseurs du 19ème siècle, de concevoir en termes de capacités de ressources intérieures que toute personne a, pour améliorer sa vie et sa santé. Et donc l’inconscient est uniquement bienveillant, et en terme de ressources, uniquement.
- Il n’a jamais voulu écrire d’ouvrages théoriques sur ses méthodes ?
Erickson s’est effectivement beaucoup méfié, et il s’en amusait, de la tendance en psychologie, je le cite « de pondre une nouvelle théorie du psychisme humain, chaque année, qui expliquerait tout, et qui serait en rupture avec les précédentes ».
Donc il était quelque part, modeste, mais surtout sérieux ; nous sommes dans l’air de la complexité, l’être humain, notre monde, notre écosystème, tout cela est complexe, et la science n’a pas tout expliqué nous le savons bien ; et Erickson pressentait déjà que nous étions à la fin des grandes idéologies, et qu’il valait mieux être pragmatique, essayer de faire de son mieux, être modeste, et puis plus tard la science nous aidera à comprendre.
- Sa théorie également parle de l’individu et que deux personnes différentes n’auront pas la même thérapie.
C’est aussi un grand apport d’Erickson. Il disait « il faut faire du sur-mesure et pas du prêt à porter».
- Pourquoi ?
Car si même en apparence, les problèmes de deux personnes peuvent être similaires voire identiques, ils n’ont pas les mêmes ressources, les mêmes capacités. Certaines personnes vont faire de la photographie ou savoir dessiner, er d’autres vont plutôt être musiciens, et encore d’autres, des compétences d’agriculteurs. Et donc les solutions ne sont pas les mêmes selon les ressources des gens, et ça c’est une rupture avec deux siècles très rationalistes que nous avons en science. Nous avions des protocoles en fonction du problème, nous devions avoir les solutions. Et le rapport entre les problèmes et les solutions n’est pas si proche que ça. Les solutions dépendent beaucoup de ce que nous savons faire dans notre vie.
Donc il y a aussi une sorte de révolution scientifique apportée par Erickson au niveau de la psychologie et maintenant c’est une nouvelle vision qui s’intègre avec ce que pensent beaucoup de personnes en dehors de la médecine et de la psychologie, des économistes, des managers, c’est d’observer ce qui marche au lieu d’essayer de supprimer ce qui ne marche pas.
- J’ai essayé de vous déstabiliser au début de l’entretien en vous posant la première question, en utilisant donc les méthodes que préconisait Erickson pour désorganiser le schéma mental. Et ça, ça aiderait à se reposer les questions et ne pas rester bloqué dans un schéma ?
Peut-être vous faites allusion effectivement à des techniques comme la surprise, la déstabilisation ? C’est une question délicate. Il ne faut pas trop pratiquer la confusion ou ces techniques de surprise voire de provocation ; il faut le faire uniquement quand c’est indispensable. Il y a effectivement des personnes qui sont figées dans leurs problèmes, et là il y a des fois une pertinence à déstabiliser la personne pour pouvoir l’aider. C’est ce que faisait Socrate il y a deux mille ans. Il déstabilisait des personnes pour qu’elles puissent s’ouvrir à la nouveauté, au changement.
Quelque part, Erickson reprend Socrate tout en accordant bien sûr une vertu importante au fait d’accompagner ensuite la personne dans la construction d’un nouvel équilibre et d’un nouveau fonctionnement. Ça c’est très important sur un plan éthique, on peut être amené à déstabiliser des personnes mais ensuite on va être très présent, très attentif pour que la personne se réorganise en lu donnant le temps de le faire correctement en fonction de ses valeurs notamment.
- Mais prendre un tel pouvoir sur des personnes, est-ce qu’il n’y a pas un risque, pour des personnes mal intentionnées, de dérapage ?
Il y a bien évidemment un risque. C’est pour cela que comme l’hypnose est actuellement en vogue, il y a une efflorescence d’instituts bidons, charlatanesques qui forment n’importe qui. Et au sein de la CFHTB, Confédération Francophone d'Hypnose et Thérapies Brèves dont je fais partie et que je co-anime avec des collègues, nous veillons à respecter des critères éthiques, de former des professionnels et aussi qu’ils respectent un certain nombre de principes et notamment que c’est le patient qui fixe lui-même l’objectif du travail thérapeutique. Nous sommes des serviteurs au service du patient.
Nous « mettons notre puissant », nous la rendons au patient ; l’approche éricksonienne c’est de donner du pouvoir au patient. C’est en cela qu’elles peuvent être subversives. Nous essayons de donner du pouvoir et de l’autonomie aux usagers et aux patients qui apprennent l’hypnose.
- Erickson craignait d’ailleurs dès le départ d’être considéré comme un gourou ou un magicien.
Erickson a toujours été très vigilent à ne pas créer de dogme, à ne pas forcément créer d’écoles, et à surtout rester très humain. Erickson disait « les faiblesses sont les fibres de la vie ». Il était lui-même avec beaucoup de déficits de santé et sensoriels et il était très attaché probablement vu ses origines très modestes et agricoles au fait que la vie est quelque chose de très fragile et qu’il faut protéger. Et il était très loin des questions de puissance et de pouvoir qu’on peut voir dans les films et dans les manifestations d’hypnose de spectacle que nous dénonçons à la Confédération.
Rappelons enfin que vous êtes rédacteur en chef de la Revue Hypnose & Thérapies Brèves
Interview retranscrite par Marion Chervy et avec la participation de Laurent Gross.