L'hypnose infirmière s'est beaucoup développée dans le domaine de la pédiatrie. Un de ses praticiens les plus expérimentés, Thierry Moreaux, nous raconte deux cas représentatifs de sa pratique en service hospitalier auprès d'enfants douloureux.
Les techniques hypnotiques agissent sur les composantes : sensoridiscriminative, émotionnelle ou affective. Les études neurophysiologiques expliquent le regain d’intérêt pour l’hypnose, car elles ont permis de montrer l’efficacité de cette technique.
L’hypnose consiste à amener l’enfant vers un état de dissociation entre le corps et l’esprit. C’est précisément parce qu’il se détache un instant de « l’ici et maintenant » par des techniques hypnotiques que l’enfant en vient à sentir son corps différemment, transformant ainsi la douleur en sensation moins pénible. Il va s’agir par exemple de l’encourager à s’évader en pensée dans un endroit agréable dans lequel il se sent bien, ou encore à métaphoriser la douleur en lui donnant forme et matière afin d’agir dessus. L’hypnose peut aussi consister à raconter des histoires à l’enfant, calquée ou non avec la sienne propre, dans le but de favoriser un état dans lequel l’enfant est « un peu ici tout en étant un peu ailleurs ».
L’enfant est particulièrement réceptif à l’hypnose dans la mesure où le trajet qui le mène à son imaginaire est moins long que pour l’adulte. L’hypnoanalgésie consiste à utiliser l’hypnose pour prévenir et limiter la douleur lors de certaines situations douloureuses : au cours des soins, en pré, per et post-opératoire. Dans ce contexte, il est courant d’encourager l’enfant à savoir se mettre lui-même en état hypnotique, dès qu’il en éprouve le besoin, par exemple au cours de soins douloureux répétés.
Aspects techniques
L’accompagnement de la prise en charge d’un geste douloureux nécessite une attention particulière auprès de l’enfant : nous devons d’emblée avoir sa confiance afin qu’il puisse se lâcher. Nous allons nous intéresser à son environnement, ses jeux, ses hobbies pour rentrer dans son monde.
L’enfant doit être prévenu avant le début du soin, pour faire connaissance avec lui et ses parents, se présenter, les rassurer et leur expliquer comment va se passer le bon déroulement du soin. A ce moment, nous présentons le masque à l’enfant pour qu’il puisse le toucher, jouer avec et se l’approprier. Nous pouvons lui proposer de mettre un feutre parfumé (fraise, banane, pomme, fruits rouges, etc.) qu’il choisit et met lui-même à l’intérieur du masque avant de commencer à l’appliquer sur son visage. Nous avons un choix de parfum qui va plaire à l’enfant. Il sera déjà dans un état hypnotique simplement par le fait de se concentrer à reconnaitre le parfum des feutres proposés : nous sommes dans son monde et il vous donne sa confiance, il est rassuré et acceptera mieux l’application du masque.
Nous profitons de ces moments pour lui demander, ainsi qu’à ses parents, ce qu’il aime (sport favori, un endroit agréable réel ou imaginaire : dans le monde des Barbapapa, de Dora si les enfants sont petits, ou de Batman s’ils sont plus grands). Nous allons nous adapter à ses goûts et ses envies, et les parents vont nous aider à chercher de bonnes ressources afin d’accompagner leur enfant le plus agréablement possible.
D’autres outils ludiques peuvent être présentés à l’enfant (sifflet, avion), que nous pouvons adapter sur la valve expiratoire du système d’inhalation pour l’aider à bien respirer à travers le masque : plus il va souffler, plus il fera bouger les hélices de l’avion ou faire fonctionner le sifflet. Nous pouvons à ce moment lui proposer un voyage avec l’avion qui va l’amener dans le pays de son rêve en adaptant nos mots à son langage et sa compréhension.
L’accompagnement de l’enfant pendant le soin est primordial, le contact verbal maintenu et le ton de la voix adapté en fonction des moments douloureux. Avant la réalisation du soin, le masque doit rester en place pendant une période d’induction de trois minutes. C’est un travail de collaboration avec l’opérateur, et c’est la personne qui surveille l’administration qui va donner son accord pour débuter l’acte. La prise en charge de la douleur lors des premiers gestes iatrogènes comprend l’anticipation de la douleur par un antalgique adapté et l’accompagnement de l’enfant tout au long du soin. L’enfant doit garder un bon souvenir du soin : si cela se passe mal la première fois, l’enfant se souviendra, lors d’un prochain geste douloureux, de la douleur et de l’angoisse qu’il aura ressenti auparavant, et le geste se déroulera la plupart du temps dans de mauvaises conditions.
Anna Taddio et ses collègues ont étudié les conséquences de la circoncision, avec ou sans anesthésie, sur les réactions aux vaccinations faites entre 4 et 6 mois. Les résultats ont montré que les garçons qui ont été circoncis sans anesthésie locale ont pleuré plus, ont montré des modifications comportementales plus importantes, des perturbations physiologiques plus grandes lors de la piqûre, par rapport aux enfants circoncis avec une anesthésie ou ceux qui n’avait pas été circoncis. D’autres études ont confirmé ces constatations. L’enfant a souvent peur des personnes qui l’entourent, du soin lui-même, et parfois du masque (il a parfois un mauvais souvenir de l’application du masque au bloc opératoire) : c’est à nous, soignants, de le distraire pour qu’il puisse focaliser son esprit sur quelque chose d’agréable et non pas sur le soin qui va être fait. Les mots et les expressions que nous allons utiliser sont importants : il ne faut pas mentir ni banaliser le soin car l’enfant perd notre confiance. Les enfants n’entendent pas les négations telles que : « N’aie pas peur », « Ne t’inquiète pas », « Cela ne va pas faire mal ». Nous allons utiliser d’autres expressions, et parfois des métaphores, pour parler à l’enfant afin d’éviter de générer des peurs et des angoisses inutiles.
Les parents sont d’une grande aide et participent au soin activement s’ils le désirent, pour rassurer leur propre enfant en lui tenant la main. Ils peuvent aussi lui appliquer le masque tout en lui racontant une histoire ou chanter avec lui. Nous pouvons utiliser des bulles de savon pour l’aider à bien respirer dans le masque et à éloigner très loin sa peur et sa douleur. Quand le geste est terminé, l’enfant doit être prévenu et félicité d’avoir été très courageux. Nous devons lui demander également ce qu’il a ressenti, évaluer sa douleur s’il est en âge de le faire lui-même avec une échelle d’autoévaluation, ou en utilisant une échelle comportementale s’il est trop petit.
Il est très important d’évaluer nos pratiques professionnelles pour améliorer la qualité des soins dans la prise en charge de la douleur. La traçabilité du geste (effets indésirables éventuels, évaluation de la douleur et de l’anxiété lors du soin, le temps d’utilisation du gaz, etc.) doit figurer dans le dossier des soins infirmiers.
1er cas clinique
Une petite fille de 6 ans doit subir une injection douloureuse en intra musculaire pour ralentir sa puberté. Le produit est très douloureux et doit être injecté lentement. Elle aura une première injection puis une autre tous les trois mois à l’hôpital puis à domicile.
Les techniques hypnotiques agissent sur les composantes : sensoridiscriminative, émotionnelle ou affective. Les études neurophysiologiques expliquent le regain d’intérêt pour l’hypnose, car elles ont permis de montrer l’efficacité de cette technique.
L’hypnose consiste à amener l’enfant vers un état de dissociation entre le corps et l’esprit. C’est précisément parce qu’il se détache un instant de « l’ici et maintenant » par des techniques hypnotiques que l’enfant en vient à sentir son corps différemment, transformant ainsi la douleur en sensation moins pénible. Il va s’agir par exemple de l’encourager à s’évader en pensée dans un endroit agréable dans lequel il se sent bien, ou encore à métaphoriser la douleur en lui donnant forme et matière afin d’agir dessus. L’hypnose peut aussi consister à raconter des histoires à l’enfant, calquée ou non avec la sienne propre, dans le but de favoriser un état dans lequel l’enfant est « un peu ici tout en étant un peu ailleurs ».
L’enfant est particulièrement réceptif à l’hypnose dans la mesure où le trajet qui le mène à son imaginaire est moins long que pour l’adulte. L’hypnoanalgésie consiste à utiliser l’hypnose pour prévenir et limiter la douleur lors de certaines situations douloureuses : au cours des soins, en pré, per et post-opératoire. Dans ce contexte, il est courant d’encourager l’enfant à savoir se mettre lui-même en état hypnotique, dès qu’il en éprouve le besoin, par exemple au cours de soins douloureux répétés.
Aspects techniques
L’accompagnement de la prise en charge d’un geste douloureux nécessite une attention particulière auprès de l’enfant : nous devons d’emblée avoir sa confiance afin qu’il puisse se lâcher. Nous allons nous intéresser à son environnement, ses jeux, ses hobbies pour rentrer dans son monde.
L’enfant doit être prévenu avant le début du soin, pour faire connaissance avec lui et ses parents, se présenter, les rassurer et leur expliquer comment va se passer le bon déroulement du soin. A ce moment, nous présentons le masque à l’enfant pour qu’il puisse le toucher, jouer avec et se l’approprier. Nous pouvons lui proposer de mettre un feutre parfumé (fraise, banane, pomme, fruits rouges, etc.) qu’il choisit et met lui-même à l’intérieur du masque avant de commencer à l’appliquer sur son visage. Nous avons un choix de parfum qui va plaire à l’enfant. Il sera déjà dans un état hypnotique simplement par le fait de se concentrer à reconnaitre le parfum des feutres proposés : nous sommes dans son monde et il vous donne sa confiance, il est rassuré et acceptera mieux l’application du masque.
Nous profitons de ces moments pour lui demander, ainsi qu’à ses parents, ce qu’il aime (sport favori, un endroit agréable réel ou imaginaire : dans le monde des Barbapapa, de Dora si les enfants sont petits, ou de Batman s’ils sont plus grands). Nous allons nous adapter à ses goûts et ses envies, et les parents vont nous aider à chercher de bonnes ressources afin d’accompagner leur enfant le plus agréablement possible.
D’autres outils ludiques peuvent être présentés à l’enfant (sifflet, avion), que nous pouvons adapter sur la valve expiratoire du système d’inhalation pour l’aider à bien respirer à travers le masque : plus il va souffler, plus il fera bouger les hélices de l’avion ou faire fonctionner le sifflet. Nous pouvons à ce moment lui proposer un voyage avec l’avion qui va l’amener dans le pays de son rêve en adaptant nos mots à son langage et sa compréhension.
L’accompagnement de l’enfant pendant le soin est primordial, le contact verbal maintenu et le ton de la voix adapté en fonction des moments douloureux. Avant la réalisation du soin, le masque doit rester en place pendant une période d’induction de trois minutes. C’est un travail de collaboration avec l’opérateur, et c’est la personne qui surveille l’administration qui va donner son accord pour débuter l’acte. La prise en charge de la douleur lors des premiers gestes iatrogènes comprend l’anticipation de la douleur par un antalgique adapté et l’accompagnement de l’enfant tout au long du soin. L’enfant doit garder un bon souvenir du soin : si cela se passe mal la première fois, l’enfant se souviendra, lors d’un prochain geste douloureux, de la douleur et de l’angoisse qu’il aura ressenti auparavant, et le geste se déroulera la plupart du temps dans de mauvaises conditions.
Anna Taddio et ses collègues ont étudié les conséquences de la circoncision, avec ou sans anesthésie, sur les réactions aux vaccinations faites entre 4 et 6 mois. Les résultats ont montré que les garçons qui ont été circoncis sans anesthésie locale ont pleuré plus, ont montré des modifications comportementales plus importantes, des perturbations physiologiques plus grandes lors de la piqûre, par rapport aux enfants circoncis avec une anesthésie ou ceux qui n’avait pas été circoncis. D’autres études ont confirmé ces constatations. L’enfant a souvent peur des personnes qui l’entourent, du soin lui-même, et parfois du masque (il a parfois un mauvais souvenir de l’application du masque au bloc opératoire) : c’est à nous, soignants, de le distraire pour qu’il puisse focaliser son esprit sur quelque chose d’agréable et non pas sur le soin qui va être fait. Les mots et les expressions que nous allons utiliser sont importants : il ne faut pas mentir ni banaliser le soin car l’enfant perd notre confiance. Les enfants n’entendent pas les négations telles que : « N’aie pas peur », « Ne t’inquiète pas », « Cela ne va pas faire mal ». Nous allons utiliser d’autres expressions, et parfois des métaphores, pour parler à l’enfant afin d’éviter de générer des peurs et des angoisses inutiles.
Les parents sont d’une grande aide et participent au soin activement s’ils le désirent, pour rassurer leur propre enfant en lui tenant la main. Ils peuvent aussi lui appliquer le masque tout en lui racontant une histoire ou chanter avec lui. Nous pouvons utiliser des bulles de savon pour l’aider à bien respirer dans le masque et à éloigner très loin sa peur et sa douleur. Quand le geste est terminé, l’enfant doit être prévenu et félicité d’avoir été très courageux. Nous devons lui demander également ce qu’il a ressenti, évaluer sa douleur s’il est en âge de le faire lui-même avec une échelle d’autoévaluation, ou en utilisant une échelle comportementale s’il est trop petit.
Il est très important d’évaluer nos pratiques professionnelles pour améliorer la qualité des soins dans la prise en charge de la douleur. La traçabilité du geste (effets indésirables éventuels, évaluation de la douleur et de l’anxiété lors du soin, le temps d’utilisation du gaz, etc.) doit figurer dans le dossier des soins infirmiers.
1er cas clinique
Une petite fille de 6 ans doit subir une injection douloureuse en intra musculaire pour ralentir sa puberté. Le produit est très douloureux et doit être injecté lentement. Elle aura une première injection puis une autre tous les trois mois à l’hôpital puis à domicile.
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1ère partie : hypnose pour l’enfant douloureux
Introduction ; recherches scientifiques clefs, avantages généraux de l’hypnose chez l’enfant douloureux (Chantal Wood)
Avantages de l’autohypnose et comment la proposer et suivre l’enfant (Isabelle Ignace)
Illustrations dans l’urgence et dans la durée (Thierry Moreaux)
Ce que l’hypnose modifie dans la relation entre soignant et soigné douloureux (Chantal Wood)
2ème partie: l'enfant et le monde
Déliances de l’enfance, reliances de l’adulte (Armelle Touyarot et Félix Benchimol)
Histoire de mère, histoire de bébé (Isabelle Stimec)
Double hommage à D. Stern (Luc Farcy. Stefano Colombo)
Un père raconte (Jean-Michel Hérin)
Le monstre dans la littérature fantastique (Didier Lafargue)
TOC chez l'enfant (Jean-François Marquet)
Hypnose solutionniste en pédiatrie ambulatoire (Hervé Fischer et Dominique Farges-Queraux)
De la pratique thérapeutique à l’art de vivre (Isabelle Celestin Lhopiteau)
3ème partie: l'enfant : un être de projet
L'importance de la relation en hypnothérapie avec l'enfant (Antoine Bioy, Chantal Wood))
Mon Alter Héros (Maxime Lamourette)
Pour acheter ce numéro de la Revue Hypnose & Thérapies Brèves à l’unité, ou vous abonner, cliquez ici
1ère partie : hypnose pour l’enfant douloureux
Introduction ; recherches scientifiques clefs, avantages généraux de l’hypnose chez l’enfant douloureux (Chantal Wood)
Avantages de l’autohypnose et comment la proposer et suivre l’enfant (Isabelle Ignace)
Illustrations dans l’urgence et dans la durée (Thierry Moreaux)
Ce que l’hypnose modifie dans la relation entre soignant et soigné douloureux (Chantal Wood)
2ème partie: l'enfant et le monde
Déliances de l’enfance, reliances de l’adulte (Armelle Touyarot et Félix Benchimol)
Histoire de mère, histoire de bébé (Isabelle Stimec)
Double hommage à D. Stern (Luc Farcy. Stefano Colombo)
Un père raconte (Jean-Michel Hérin)
Le monstre dans la littérature fantastique (Didier Lafargue)
TOC chez l'enfant (Jean-François Marquet)
Hypnose solutionniste en pédiatrie ambulatoire (Hervé Fischer et Dominique Farges-Queraux)
De la pratique thérapeutique à l’art de vivre (Isabelle Celestin Lhopiteau)
3ème partie: l'enfant : un être de projet
L'importance de la relation en hypnothérapie avec l'enfant (Antoine Bioy, Chantal Wood))
Mon Alter Héros (Maxime Lamourette)
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